Les inspirateurs de notre raison d’être au service du foyer d'harmonie Motherland
Notre projet de constituer un foyer d'harmonie s'inscrit dans le droit fil de ceux qui pour nous incarnent le Suprême et la Mère Divine :
1 - Sri Aurobindo et, par exemple, dans La vie divine
"The true solution can intervene only when by our spiritual growth we can become one self with all beings, know them as part of our self, deal with them as if they were our other selves; for then the division is healed, the law of separate self-affirmation leading by itself to affirmation against or at the expense of others is enlarged and liberated by adding to it the law of our self-affirmation for others and our self-finding in their self-finding and self-realisation. It has been made a rule of religious ethics to act in a spirit of universal compassion, to love one’s neighbour as oneself, to do to others as one would have them do to us, to feel the joy and grief of others as one’s own; but no man living in his ego is able truly and perfectly to do these things, he can only accept them as a demand of his mind, an aspiration of his heart, an effort of his will to live by a high standard and modify by a sincere endeavour his crude ego-nature. It is when others are known and felt intimately as oneself that this ideal can become a natural and spontaneous rule of our living and be realised in practice as in principle. But even oneness with others is not enough by itself, if it is a oneness with their ignorance; for then the law of ignorance will work and error of action and wrong action will survive even if diminished in degree and mellowed in incidence and character. Our oneness with others must be fundamental, not a oneness with their minds, hearts, vital selves, egos, — even though these come to be included in our universalised consciousness, — but a oneness in the soul and spirit, and that can only come by our liberation into soul-awareness and self-knowledge."
~ Sri Aurobindo
CWSA Vol. 21-22, The Life Divine, P. 652-653
Traduction en français :
« La vraie solution ne peut venir que lorsque notre croissance spirituelle atteint le point où nous-même et tous les êtres ne formons plus qu'un seul moi, où nous les connaissons comme une partie de notre moi, les traitons comme s'ils étaient nos autres-moi; car alors la division
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est abolie, la loi d'affirmation de soi séparée, qui conduit tout naturellement à l'affirmation de soi contre les autres ou à leurs dépens, s'élargit et se libère par l'apport d'une autre loi, celle de l'affirmation de soi pour autrui et de la découverte de soi en leur propre découverte et leur propre réalisation. On s'est fait une règle, en morale religieuse, d'agir dans un esprit de compassion universelle, d'aimer son prochain comme soi-même, de faire aux autres ce que l'on voudrait qu'ils nous fassent à nous-mêmes, d'éprouver comme nôtres et leur joie et leur peine; mais aucun homme vivant en son ego ne p'eut véritablement et parfaitement accomplir de telles choses, il ne peut que les accepter comme une exigence de son mental, une aspiration de son cœur, un effort de sa volonté pour vivre selon une norme élevée et modifier, par un effort sincère, sa nature égoïste grossière. C'est, quand on connaît et qu'on sent intimement les autres comme soi-même, que cet idéal peut devenir une règle de vie naturelle et spontanée et être réalisé en pratique comme en son principe. Mais être un avec les autres n'est pas même suffisant en soi, si c'est être un avec leur ignorance; car alors la loi de l'ignorance agira, l'action erronée et l'action fausse persisteront, fût-ce à un moindre degré et même si leur incidence et leur caractère sont atténués. Notre union avec les autres doit être fondamentale ; ce ne doit pas être une union, avec leur mental, leur cœur, leur être vital, leur ego — bien qu'ils finissent par être inclus dans notre conscience universalisée —, mais une union en l'âme et en l'esprit, et cela ne peut se produire que par notre libération en la conscience de l'âme et là connaissance du moi. Être nous-mêmes affranchis de l'ego et réaliser notre vrai moi, telle est la première nécessité; tout le reste peut ensuite s'accomplir, en être le lumineux résultat, la conséquence nécessaire. C'est l'une des raisons pour lesquelles un appel spirituel doit être accepté de façon impérative et prendre le pas sur toutes les autres revendications, intellectuelles, éthiques ou sociales, qui relèvent du domaine de l'Ignorance. Car la loi mentale du bien appartient à ce domaine et ne peut que modifier les choses et servir de palliatif; rien ne saurait vraiment remplacer le changement spirituel qui peut réaliser le bien véritable et intégral, car c'est l'esprit qui nous conduit à la racine de l'action et de l'existence.
La connaissance spirituelle du moi s'accomplit en trois étapes, qui sont en même temps trois parties de l'unique connaissance. La première est la découverte de l'âme, non point l'âme extérieure de pensée, d'émotion et de désir, mais l'entité psychique secrète, l'élément
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divin en nous. Quand elle domine notre nature, quand nous sommes consciemment l'âme et quand le mental, la vie et le corps prennent leur vraie place d'instruments de l'âme, nous devenons conscients d'un guide intérieur qui connaît la vérité, le bien, le vrai délice et la vraie beauté de l'existence, qui gouverne le cœur, et l'intellect par sa loi lumineuse et conduit notre vie et notre être vers la plénitude spirituelle. Même dans les obscures opérations de l'Ignorance, nous avons alors un témoin qui discerne, une lumière vivante qui illumine, une volonté qui refuse de se laisser fourvoyer et qui sépare la vérité mentale de l'erreur, fait la distinction entre la réponse intime du cœur et ce qui vibre en lui en réponse à un faux appel ou à une fausse demande qui lui est faite, ne confond pas l'ardeur véritable et le plein mouvement de la vie avec la passion vitale et les mensonges turbides de notre nature vitale et la recherche de ses obscures satisfactions égoïstes. Telle est la première étape de la réalisation de soi : instaurer le règne de l'âme, l'individu psychique divin, à la place de l'ego.
L'étape suivante consiste à prendre conscience du moi éternel en nous, non né, un avec le moi de tous les êtres. Cette réalisation de soi libère et universalise ; même si notre action se poursuit encore selon la dynamique de l'Ignorance, elle ne nous enchaîne plus, ne nous égare plus, car notre être intérieur trône dans la lumière de la connaissance de soi. La troisième étape nous amène à connaître l'Être divin qui est à la fois notre suprême Moi transcendant, l'Être cosmique, fondement de notre universalité, et le Divin intérieur dont notre être psychique, le vrai individu évolutif en notre nature, est une part, une étincelle, une flamme qui grandit en le Feu éternel où il fut allumé et dont il est le témoin toujours vivant en nous et l'instrument conscient de sa lumière, de son pouvoir, de sa joie et de sa beauté. Conscients que le Divin est le Maître de notre être et de notre action, nous pouvons apprendre à devenir les canaux de Sa Shakti, la Puissance divine, et à agir selon ses ordres ou la loi de sa lumière et de son pouvoir en nous. Notre action ne sera plus, dès lors, gouvernée par nos impulsions vitales ou soumise à une norme mentale, car la Shakti agit suivant la vérité permanente et néanmoins plastique des choses — non la vérité que construit le mental, mais celle plus haute, plus profonde et plus subtile de chaque mouvement et de chaque circonstance telle que la connaît la connaissance suprême et que l'exige la suprême volonté dans l'univers. La libération de la volonté suit la libération de la connaissance, elle en est la conséquence dynamique. C'est la connaissance qui purifie, c'est la vérité qui libère ; le mal est le fruit d'une ignorance spirituelle et il ne disparaîtra que par la croissance
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d'une conscience spirituelle, et: là lumière' de la connaissance spirituelle. Notre être est séparé des autres êtres, et cette division ne peut disparaître qu'en annulant le divorce entre notre nature et la réalité intérieure de l'âme, qu'en supprimant le voile entre notre devenir et notre être essentiel; qu'en jetant un pont sur l'espace qui éloigne notre individualité dans la Nature de l'Être divin qui est la Réalité omniprésente dans la Nature et au-delà.
Mais la dernière division qui; reste à éliminer est la scission entre cette Nature et la Supra-Nature qui est le Pouvoir-en-soi de l'Existence divine. Même avant que la l'intuition dynamique ne soit annulée, tant qu'elle demeure comme une instrumentation inadéquate de l'esprit, la Shakti suprême ou Supranature peut œuvrer à travers nous et nous pouvons être conscients de ses opérations; mais elle le fait en modifiant sa lumière et son pouvoir afin que la nature inférieure - le mental, la vie et le corps — puisse la recevoir et l'assimiler. Mais cela ne suffit pas; il est nécessaire de remodeler entièrement ce que nous sommes et d'en faire un état et un pouvoir de la Supranature divine. Cette intégration de notre être ne peut être complète à moins que l'action dynamique ne -soit ainsi transformée ; c'est tout le mode de la Nature elle-même qui doit être soulevé et changé : illuminer et transmuer les états intérieurs de l'être n'est pas suffisant. Une Conscience-de-Vérité éternelle doit prendre possession de nous et, sublimant tous les modes de notre nature, l'es changer en ses propres modes d'être, de connaissance et d'action. Une perception, une volonté, un sentiment, un mouvement, une action spontanément vrais peuvent alors devenir la loi intégrale de notre nature. »
Dans ce passage final de La vie divine, Sri Aurobindo nous donne l'horizon de toute association en vue de la transformation divine de notre humanité.
2 - Mère, la compagne de Sri Aurobindo, par exemple, en disant son rêve
Un rêve
« Il devrait y avoir quelque part sur la terre un lieu dont aucune nation n’aurait le droit de dire : il est à moi ; où tout homme de bonne volonté ayant une aspiration sincère pourrait vivre librement comme un citoyen du monde, et n’obéir qu’à une seule autorité, celle de la suprême vérité.
Un lieu de paix, de concorde, d’harmonie, où tous les instincts guerriers de l’homme seraient utilisés exclusivement pour vaincre les causes de ses souffrances et de ses misères, pour surmonter ses faiblesses et ses ignorances, pour triompher de ses limitations et de ses incapacités ; un lieu où les besoins de l’esprit et le souci du progrès primeraient la satisfaction des désirs et des passions, la recherche des plaisirs et de la jouissance matérielle.
Dans cet endroit, les enfants pourraient croître et se développer intégralement sans perdre le contact avec leur âme ; l’instruction serait donnée, non en vue de passer des examens ou d’obtenir des certificats et des postes, mais pour enrichir les facultés existantes et en faire naître de nouvelles. Dans ce lieu, les titres et les situations seraient remplacés par des occasions de servir et d’organiser ; il y serait pourvu aux besoins du corps également pour tous, et la supériorité intellectuelle, morale et spirituelle se traduirait dans l’organisation générale, non par une augmentation des plaisirs et des pouvoirs de la vie, mais par un accroissement des devoirs et des responsabilités. La beauté sous toutes ses formes artistiques: peinture, sculpture, musique, littérature, serait accessible à tous également, la faculté de participer aux joies qu’elle donne étant limitée uniquement par la capacité de chacun et non par la position sociale ou financière.
Car dans ce lieu idéal, l’argent ne serait plus le souverain seigneur ; la valeur individuelle aurait une importance très supérieure à celle des richesses matérielles et de la position sociale. Le travail n’y serait pas le moyen de gagner sa vie, mais le moyen de s’exprimer et de développer ses capacités et ses possibilités, tout en rendant service à l’ensemble du groupe qui, de son côté, pourvoirait aux besoins de l’existence et au cadre d’action de chacun.
En résumé, ce serait un endroit où les relations entre êtres humains, qui sont d’ordinaire presque exclusivement basées sur la concurrence et la lutte, seraient remplacées par des relations d’émulation pour bien faire, de collaboration et de réelle fraternité.
La terre n’est pas prête pour réaliser un semblable idéal, parce que l’humanité ne possède pas encore la connaissance suffisante pour le comprendre et l’adopter, ni la force consciente indispensable à son exécution ; et c’est pourquoi je l’appelle un rêve.
Pourtant, ce rêve est en voie de devenir une réalité; et c’est à cela que nous nous efforçons à l’Ashram de Sri Aurobindo, sur une toute petite échelle à la mesure de nos moyens réduits. La réalisation est certes loin d’être parfaite, mais elle est progressive ; et petit à petit, nous nous avançons vers notre but qui, nous l’espérons, pourra un jour être présenté au monde comme un moyen pratique et efficace de sortir du chaos actuel, pour naître à une vie nouvelle harmonieuse et plus vraie. »,
Mère, 1954
Motherland a d'abord pour vocation d'être une des matérialisations de ce rêve de Mère.
L'ashram puis Auroville sont des pas en ce sens.
Motherland prendra forme en devenant un miroir de la volonté de Mère de plus en plus poli par le yoga de Sri Aurobindo.
3 - Les visions des disciples de Mère et Sri Aurobindo
En France, deux lignées de disciples de Sri Aurobindo et Mère nous semblent avoir fourni des apports essentiels en vue de nourrir notre projet.
Dans le monde francophone, Satprem nous a conduit à nous intéresser et à nous placer sous la guidance de Mère et Sri Aurobindo.
Et en France, Amita et Niranjan Guha Roy ont été les premiers à édifier un sanctuaire pour la Mère divine, la Mahashakti qui porte le flux évolutif conduisant au-delà de l'homme.
Leur sanctuaire à Baden dans le Morbihan s'appelle Motherland. Notre foyer d'harmonie en reprenant le nom du leur s'inscrit à leur suite.
A - Une vision de Satprem dans La Genèse du Surhomme au chapitre La sociologie du Surhomme.
« Ils sont dix ou vingt, ou cinquante peut-être, ici ou là, sous cette latitude ou une autre, qui veulent labourer un coin de terre plus véridique, labourer un coin d’homme pour faire pousser en eux-mêmes un être plus vrai, faire peut-être ensemble un laboratoire du surhomme, poser une première pierre de la Cité de la Vérité sur la terre. Ils ne savent pas, ils ne savent rien, sinon qu’ils ont besoin d’autre chose et qu’il existe une Loi d’Harmonie, un merveilleux « quelque chose » du Futur qui demande à s’incarner. Et ils veulent trouver les conditions de cette incarnation, se prêter à l’épreuve, livrer leur substance à cette expérience dans le vif. Ils ne savent rien, sinon que tout doit être autre: dans les cœurs, dans les gestes, dans la matière et la culture de cette matière. Ils ne cherchent pas à faire une nouvelle civilisation, mais un autre homme; pas une super-cité parmi les millions de buildings du monde, mais un poste d’écoute des forces du futur, un suprême yantra de la Vérité, un conduit, un chenal pour tenter de capter et d’inscrire dans la matière une première note de la grande Harmonie, un premier signe tangible du nouveau monde. Ils ne se posent en champions de rien, ils ne sont les défenseurs d’aucune liberté, les agresseurs d’aucun isme: simplement, ils essayent ensemble, ils sont les champions de leur propre petite note pure, qui n’est celle d’aucun voisin, et qui pourtant est la note de tout le monde. Ils ne sont plus d’un pays, plus d’une famille, d’une religion ou d’un parti : ils ont pris le parti d’eux-mêmes, qui n’est le parti d’aucun autre, et pourtant le parti du monde parce que, ce qui devient vrai en un point, devient vrai pour tout le monde et rejoint tout le monde ; ils sont d’une famille à inventer, d’un pays qui n’est pas encore né. Ils ne cherchent pas à redresser les autres ni personne, à déverser sur le monde des charités glorifiantes, à soigner les pauvres et les lépreux: ils cherchent à guérir en eux-mêmes la grande pauvreté de la petitesse, l’elfe gris de la misère intime, à conquérir sur eux-mêmes une seule petite parcelle de vrai, un seul petit rayon d’harmonie, car, si cette Maladie est guérie dans notre propre cœur ou dans quelques cœurs, le monde s’en trouvera plus léger, et, par notre clarté, la Loi de Vérité entrera mieux dans la matière et rayonnera autour spontanément. Quelle délivrance, quel soulagement au monde peut apporter celui-là qui peine dans son propre cœur ? Ils ne travaillent pas pour eux-mêmes, bien qu’ils soient le terrain premier de l’expérience, mais en offrande, pure et simple, à cela qu’ils ne connaissent pas vraiment mais qui frémit au bord du monde comme l’aurore d’un nouvel âge. Ils sont les prospecteurs du nouveau cycle. Ils se sont donnés à l’avenir, corps et biens, comme on se jette dans le feu, sans un regard derrière soi. Ils sont les serviteurs de l’infini dans le fini, de la totalité dans l’infime, de l’éternel dans chaque instant et dans chaque geste. Ils créent leur ciel à chaque pas et taillent le nouveau monde dans la banalité du jour. Et ils n’ont pas peur de l’échec, car ils ont laissé derrière eux les échecs avec le succès de la prison – ils sont dans la seule infaillibilité d’une petite note juste.
Mais ces constructeurs du nouveau monde prendront bien garde de ne pas bâtir une nouvelle prison, fût-ce une prison idéale et bien éclairée. En fait, ils comprendront, et vite, que cette Cité de la Vérité ne sera pas et ne peut pas être tant qu’ils ne seront pas eux-mêmes et totalement dans la Vérité, et que cette terre à bâtir est d’abord et avant tout le terrain de leur propre transmutation. On ne triche pas avec la Vérité. On peut tricher avec les hommes, faire des discours et des déclarations de principe, mais la Vérité s’en moque : elle vous attrape sur le fait et à chaque pas vous jette votre mensonge à la figure. C’est un impitoyable phare, même s’il est invisible. Et c’est très simple, elle vous attrape dans tous les coins et à tous les tournants, et comme c’est une Vérité de la matière, elle démolit vos plans, entrave votre geste, vous met subitement devant un manque de matériaux, un manque d’ouvriers, un manque d’argent, suscite cette révolte, dresse les gens les uns contre les autres, sème l’impossibilité et le chaos, – jusqu’à ce que, soudain, le chercheur comprenne qu’il faisait fausse route, qu’il construisait la vieille bâtisse mensongère avec des briques neuves et secrétait son petit égoïsme, sa petite ambition, son petit idéal, sa mince idée du vrai et du bien. Alors, il ouvre les yeux, il ouvre les mains, il se raccorde à la grande Loi, laisse couler le rythme et se fait clair, clair, transparent, souple à la Vérité, au n’importe quoi qui veut être – n’importe quoi mais que ce soit ça, le geste exact, la pensée juste, le travail vrai, la vérité pure qui s’exprime comme elle veut, quand elle veut, de la façon qu’elle veut. Une seconde, il s’abandonne. Une seconde, il appelle ce monde nouveau – si nouveau qu’il n’y comprend rien mais qu’il veut servir, incarner, faire pousser dans cette terre rebelle, et qu’importe ce qu’il en pense, ce qu’il en sent, ce qu’il en juge, oh ! qu’importe, mais que ce soit la vraie chose, la seule chose voulue et inévitable. Et tout bascule dans la lumière – en une seconde. Tout devient possible instantanément: les matériaux arrivent, les ouvriers, l’argent, le mur s’écroule, et cette petite bâtisse égoïste qu’il était en train d’édifier, se change en une possibilité dynamique qu’il n’avait même pas soupçonnée. Cent fois, mille fois, il fait l’expérience, à tous les niveaux, personnels, collectifs, dans ce battant de fenêtre qu’il ajuste pour sa chambre ou dans le million subit qui « tombe du ciel » pour construire un stade olympique.
Il n’y a pas, jamais de « problèmes matériels », il y a seulement des problèmes intérieurs.
Et si la Vérité n’y est pas, même les millions pourriront sur place. C’est une fabuleuse expérience de toutes les minutes, une mise à l’épreuve de la Vérité, et, plus merveilleusement encore, une mise à l’épreuve du pouvoir de la Vérité. Il apprend pas à pas à découvrir l’efficacité de la Vérité, la suprême efficacité d’une petite seconde claire – il entre dans un monde de petites merveilles continues. Il apprend à avoir confiance en la Vérité, comme si tous ces coups, ces ratages, ces querelles, cette confusion, le conduisaient savamment, patiemment, mais impitoyablement, à prendre l’attitude juste, découvrir le vrai ressort, le regard vrai, le cri de vérité qui renverse les murs et fait éclater tous les possibles dans l’impossible chaos. C’est une transmutation accélérée et comme multipliée par les résistances de chacun autant que par ses bonnes volontés – comme si, en vérité, et les résistances et les bonnes volontés, le bien autant que le mal, devaient se changer en autre chose, une autre volonté, une volonté-vision de Vérité qui à chaque instant décide du geste et du fait. C’est la seule loi de la Cité de l’Avenir, son seul gouvernement: une vision claire qui s’accorde à l’Harmonie totale et qui traduit spontanément en actes la Vérité perçue. Les faussaires sont automatiquement éliminés, par la pression même de la Force de Vérité, refoulés, comme le poisson, par excès d’oxygène. Et si, un jour, ces dix ou ces cinquante, ou ces cent-là, pouvaient bâtir une seule petite pyramide de vérité dont chaque pierre aurait été posée avec la note juste, la vibration juste, l’amour simple, le regard clair et l’appel du futur, en vérité la cité entière serait bâtie, parce qu’ils auraient bâti en eux-mêmes l’être du futur. Et peut-être la terre entière s’en trouverait-elle changée, parce qu’il n’y a qu’un corps ; parce que cette difficulté de l’un est la difficulté du monde, cette résistance, cette obscurité de l’autre, sont la résistance et l’obscurité du monde entier, et que cette toute petite entreprise d’une petite ville sous les étoiles est peut-être l’Entreprise même du monde, le symbole de sa transmutation, l’alchimie de sa douleur, la possibilité d’une terre nouvelle par la seule transfiguration d’un coin de terre et d’un coin d’homme. »
B - Une des visions de Niranjan Guha Roy dans Méditations sur l'avenir
Amita Guha Roy nous a partagé les visions de Niranjan recueillies par elle en 2004 et 2005 avant qu'il ne quitte son corps.
Voici un extrait significatif de Méditations sur l'avenir, "Les corps de demain", p.23-24 :

