vendredi 9 août 2024

Quel rôle joue le yoga de Sri Aurobindo et Mère dans la genèse du surhomme ? selon Satprem.



Photo de Satprem

Réponse à une lettre d'une lectrice de La Genèse du surhomme.


Pondichéry, le 6 avril 1971


Vous avez un fameux toupet de dire que Sri Aurobindo n’avait pas la clef du yoga du surhomme et que son yoga intégral était un raffinement de la bulle mentale ! Et où donc ai-je appris ce que j’écris, sinon de Mère et de Sri Aurobindo ? Vous oubliez que c’est grâce à lui que ce yoga du surhomme est possible, que c’est lui qui l’a préparé, lui qui a fait descendre le grand flot de la Nouvelle Conscience afin que, au lieu de chercher là-haut la divine Vérité, les hommes puissent la vivre ici-bas et marcher dedans à chaque pas. Autant dire que Sri Aurobindo n’avait pas la clef de la porte qu’il a ouverte !

Son yoga est intégral parce que, au lieu de confiner la quête sur les hauteurs spirituelles, il nous a dit et répété qu’il fallait y mettre son corps aussi et faire descendre, dans son corps et dans sa vie, la Vérité spirituelle. La voie de l’ascension et tous les autres chemins, les autres plans de conscience, font partie d’un développement intégral – pour ceux qui ont le temps et les capacités spéciales que cela exige. Mais l’heure n’est plus à ces excursions, puisque tout peut être trouvé ici – puisque, justement, Sri Aurobindo et Mère ont ouvert ce chemin d’ici. 

Rappelez-vous, je vous prie, la déclaration de Mère : 

« Sri Aurobindo est venu nous dire: il n’est pas nécessaire de quitter la terre pour trouver la Vérité, il n’est pas nécessaire de quitter la vie pour trouver son âme, il n’est pas nécessaire d’abandonner le monde ni d’avoir des croyances limitées pour entrer en relation avec le Divin. Le Divin est partout, en toutes choses, et s’il est caché, c’est que nous ne nous donnons pas la peine de le découvrir. » (Entretiens, 13.8.1958) 

Et encore ceci : 

« La vie spirituelle, pour beaucoup, c’est la méditation. Tant que cette sottise ne sera pas déracinée de la conscience humaine, la force supramentale éprouvera toujours une difficulté considérable à ne pas être engloutie dans l’obscurité d’une pensée humaine qui ne comprend rien.» (Entretiens, 17.4.1957) 

Et si vous savez lire Sri Aurobindo et Mère, vous verrez qu’ils ont parfaitement décrits ce chemin d’ici et cette voie ensoleillée – la Genèse ne fait que mettre l’accent volontairement exclusif sur cet «ici», parce qu’il n’y a pas de temps à perdre, parce que tout le monde n’a pas les capacités spéciales pour faire des explorations en grand, parce que, enfin, nous sommes à l’Heure de Dieu – nous y sommes ! C’est là. Parce que, vraiment, il y a quelque chose de changé dans le monde depuis 1969.

Ce n’est pas le yoga de Sri Aurobindo qui est changé, c’est le yoga de Sri Aurobindo qui est en fleurs, si j’ose dire. Je ne pense pas que la fleur du flamboyant soit le contraire de l’arbre du flamboyant ?

Maintenant, vous faites une confusion complète entre le psychique et le spirituel. Le psychique, l’âme, le Feu dedans, Agni, n’appartient pas à la «bulle mentale» ni à aucune bulle : c’est le Divin dans la matière. C’est ce petit Feu-là qui ouvre la porte du grand Feu solaire de la Nouvelle Conscience. C’est lui, l’instrument du yoga du surhomme (quand je parle de ces gens qui tournent leur «bouton psychique», je prends ici ce mot au sens vulgaire et ridicule que les hommes lui donnent généralement quand ils cherchent des expériences visionnaires et occultes – pas au sens vrai). 

D’autres, à tous les âges, ont eu l’expérience du psychique, de ce Feu intérieur, mais à part les Rishis, nul ne s’en est servi pour transformer la matière; les religions en ont fait une histoire purement dévotionnelle et «mystique». 

Quant au «spirituel», il comprend tous les plans de conscience au-dessus du mental ordinaire. C’est la voie de l’ascension. Et c’est là que je dis et répète avec force, et par expérience, que ces grandes Expériences, dont on a fait des sommets spirituels, se situent dans la bulle mentale (y compris le surmental) : ce sont des sommets raréfiés où l’être se dilue dans une merveilleuse blancheur, immense, royale, sans un souffle de trouble, dans une paix éternelle – qui peut durer des millénaires sans que cela change un iota au monde, par définition. Mais le spirituel n’est pas le supramental, et quand on touche au supramental, on dirait presque que c’est un tout autre Esprit tellement c’est dense, chaud, puissant, présent, incarné, et radieuse-ment solide en pleine rue. C’est cette Radiance-là que Sri Aurobindo et Mère sont venus tirer sur la terre – ils n’ont pas cessé de dire que leur yoga était nouveau, nouveau, nouveau – , et c’est par notre simple petit feu dedans que nous pouvons entrer en contact direct avec Ça, sans nous asseoir en lotus et sans quitter la vie. Quand on a touché Ça, les «hauteurs spirituelles» paraissent pâles. 

C’est tout ce que j’ai à dire. Alors il n’est pas du tout besoin d’être un super-yogi pour entrer en contact, et ceux qui ont trouvé le nirvana ou que sais-je ne sont pas avancés d’un centimètre pour toucher Ça, parce que le fil conducteur de Ça n’est pas du tout là-haut ni en dehors, mais dans votre propre petite capacité de flamme.

Et si au lieu de couper les cheveux en quatre, vous vous lanciez sur le chemin, avec feu, vous découvririez peut-être que nous sommes à l’Heure de Dieu, en effet, et qu’une seule étincelle d’effort sincère, à votre niveau, ouvre des portes qui ont été fermées pendant des millénaires.


Satprem


P.S. Pour que vous sachiez lire Mère, je vous envoie ci-joint deux textes d’Elle.


Sri Aurobindo et Mère


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