Aspiration à la lumière - Tableau de Niranjan Guha Roy |
Une œuvre d'art ou un spectacle exprime une certaine conscience. Elle se produit en allant puiser à divers niveaux de conscience.
L'artiste, qui obéit à une commande ou qui veut une audience, va souvent malheureusement puiser au seul niveau de conscience du public qu'il veut voir se mobiliser, à la fois ceux qu'il enthousiasmera, ceux qu'il choquera et ceux qui jugeront que ces réactions traduisent des valeurs négatives. Ainsi juger satanique un spectacle ou une œuvre d'art parait un raccourci.
Tout d'abord, c'est se mobiliser autour de l'œuvre. Duchamp avec sa Fontaine et ses ready-made a réduit le geste artistique à ce seul geste de provocation. Par ailleurs, les forces hostiles à toute nouvelle conscience et donc à toute création véritable ne veulent surtout pas qu'on réalise que toute production mentale est quelque part une fiction. Une caractéristique du mensonge est de faire passer une fiction pour vraie. Or le préambule de toute production artistique est qu'il s'agit d'une fiction sinon c'est de la propagande et de la publicité !
Ne juger une œuvre d'art que sur le mode de ce que vaut une propagande ou une publicité, c'est oublier son préambule : c'est un spectacle fictif, une production artistique fictive. Le mensonge est alors actif en nous, il est de croire que tout ce qui est exprimé vaut acte, que tout ce qui est ressenti est dû à ce qui est contemplé. Une œuvre d'art est artistique non par les valeurs morales et spirituelles qu'immanquablement elle véhicule, mais par la figuration du pouvoir créateur dont elle est l'expression et la trace. Et c'est là qu'il y a divers niveaux de conscience à l'œuvre.
Il est important de laisser s'exprimer la liberté artistique : cela garantit la libre recherche de la vie intérieure créatrice ; manipuler toute fiction comme fiction, entrer dans son jeu sans oublier que c'est une fiction, permet de d'ailleurs mieux voir en nous ce qui agit. La sensibilité artistique est de sentir ou de pressentir la nature du pouvoir producteur ou créateur à l'œuvre. Et elle est le fruit d'une aspiration à des flux créateurs plus divins, plus créateurs par là-même. Elle est l'émanation du sens du jeu divin de la manifestation, de la Lila, disent les sages de l'Inde.
Il y a des œuvres d'art qui facilitent le développement de cette sensibilité. De quelles fictions je me nourris ? Quand je regarde de bout en bout une fiction et critique cette fiction comme satanique, où est passé mon ouverture au geste créateur constitutif de la sensibilité artistique ? Quand cette sensibilité grandit, on ne s'embarrasse pas de ce qui ne la touche pas.
Par exemple, Mère estimait que la destruction des canons esthétiques par l'art moderne, les sacrilèges fictifs contre le beau d'alors, n'était pas un rabaissement de la conscience, mais un prélude à une expression artistique d'une conscience nouvelle. Sri Aurobindo notait que, parmi ses disciples, il y avait beaucoup d'artistes ou que certains entrant sur cette voie le devenaient. La musique de Mère, la poésie et le style de Sri Aurobindo nourrissent la sensibilité pour qui sait le voir à un degré peu encore perçu par l'art mainstream. Parmi les disciples de Sri Aurobindo et Mère, le génie littéraire de Satprem est évident. Pour moi, Niranjan Guha Roy est un autre aventurier de la conscience nouvelle que Sri Aurobindo et Mère ont commencé à incarner, qui a des créations musicales, poétiques et picturales nourrissantes sur cette voie d'un yoga intégral attentif à la beauté.
Serge
Fais de la Beauté ton constant idéal.
La beauté de l’âme
la beauté des pensées
la beauté des sentiments
la beauté de l’action
la beauté dans le travail,
que rien ne sorte de tes mains qui ne soit une expression de beauté pure et harmonieuse.
Et l’aide divine sera toujours avec toi.
Douce Mère
21 janvier 1963
Œuvre de Niranjan Guha Roy |
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