Œuvre d'Amita Guha Roy
Question : La soumission n’est-elle pas la même chose que le sacrifice ?
Douce Mère :
Dans notre yoga, il n’y a pas de place pour le sacrifice. Mais naturellement, tout dépend du sens que vous donnez au mot. Dans son sens pur, il veut dire sanctifier, consacrer par l’offrande au Divin.
Mais par la signification qu’on lui donne à présent, le mot sacrifice est devenu synonyme de destruction ; il apporte avec lui une atmosphère de négation. Ce genre de sacrifice ne peut être un accomplissement; c’est une diminution, une immolation de soi. Car ce sont vos possibilités que vous sacrifiez, les réalisations de votre personnalité, depuis le plan matériel jusqu’au plan spirituel le plus élevé.
Le sacrifice diminue votre être. si vous sacrifiez physiquement votre vie, votre corps, vous perdez toutes vos possibilités dans le monde matériel; vous renoncez à l’accomplissement de votre existence terrestre. De la même manière, vous pouvez moralement sacrifier votre vie ; vous renoncez alors à l’amplitude et au libre épanouissement de votre vie intérieure. il y a toujours, dans cette idée d’immolation de soi, un sens d’obligation, de compulsion, un déni de soi imposé. C’est un idéal qui ne laisse pas de place aux plus profondes et plus larges spontanéités de l’âme.
Par soumission, nous n’entendons rien de ce genre, mais un don de soi spontané, le don de votre moi au Divin, à une plus grande conscience dont vous faites partie. La soumission ne vous diminuera pas, mais vous augmentera; elle ne réduira pas, ni n’affaiblira, ni ne détruira votre personnalité, mais au contraire la fortifiera et l’agrandira. Par soumission, nous voulons dire un don intégral, fait librement, avec toute la félicité que le mouvement comporte ; il n’y a aucun sens de sacrifice en cela.
Si vous avez la moindre sensation que vous faites un sacrifice, alors ce n’est plus la vraie soumission; car cela implique que vous vous réservez ou que vous essayez de vous donner, mais à contrecœur, avec douleur et effort — et ainsi vous n’avez pas la joie du don — ou peut-être même n’avez-vous pas le sentiment de vous donner, mais celui d’être pris de force. Quand vous faites quoi que ce soit avec le sentiment que votre être subit une contrainte, soyez sûr que vous le faites de la mauvaise manière.
La vraie soumission vous élargit, elle augmente votre capacité ; elle vous donne, en qualité et en quantité, une plus grande mesure que celle que vous auriez jamais eue par vous-même. Cette plus grande mesure de qualité et de quantité est différente de tout ce que vous auriez pu atteindre autrement ; vous entrez dans un autre monde, dans une ampleur où vous n’auriez jamais pu pénétrer si vous n’aviez fait votre soumission. C’est comparable à une goutte d’eau qui tombe dans la mer ; si elle y gardait son identité séparée, elle ne serait qu’une petite goutte d’eau et rien de plus, une petite goutte écrasée par l’immensité qui l’entoure ; mais en perdant sa forme propre, elle se fond dans la mer, s’unit à elle et participe de sa nature, de son pouvoir et de son immensité. Ainsi en est-il de la vraie soumission.
Mère, Entretiens, 4 août 1929
Œuvre d'Amita et Niranjan Guha Roy |
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